Nouma, 19 ans, est en deuxième année de licence "administration et échanges
internationaux" (AEI), à l'université de Créteil (Val-de-Marne). Arrivé
dans la capitale il y a deux ans, il bénéficie d'une bourse de 423
euros et d'une aide au logement de 180 euros. Néanmoins, comme beaucoup
d'autres étudiants, il n'arrive pas à boucler son budget dans lequel le
loyer représente à lui seul 560 euros. Son père, cadre dans un hôpital,
paye la différence.L'Observatoire de la vie étudiante (OVE) devrait publier sa prochaine enquête Conditions de vie en
octobre. Depuis l'étude de 2003, la situation s'est dégradée. Ainsi,
l'UNEF et la FAGE, les deux principaux syndicats étudiants, ont calculé
que, pour la rentrée universitaire 2006, les étudiants ont dû faire
face à une inflation de 1,9 % alors que les bourses accordées sur
critères sociaux n'ont augmenté que de 1,5 %.
Selon l'OVE, les
aides distribuées par le gouvernement représentent en moyenne 24 % du
revenu mensuel des étudiants. Ce qui oblige beaucoup d'entre eux à
occuper un emploi ou à se faire aider par leurs parents. Selon l'OVE,
huit étudiants sur dix ont une activité rémunérée pendant l'année
universitaire.
"Il est difficile de concilier les deux
activités. On n'a pas de temps de repos. Il ne nous reste que les
soirées. Mais on les passe à réviser les cours", raconte Julie, 20
ans, étudiante en histoire. Elle est serveuse vingt heures par semaine
dans un McDonald's pour un salaire de 550 euros par mois environ. Outre
leur pénibilité, les transports pèsent particulièrement sur le budget
de Julie. Et le système de la carte de transport Imagine "R", mis en
place par la région Ile-de-France, ne suffit pas pour l'aider à boucler
ses fins de mois, d'autant que son lieu de travail n'est pas dans la
même zone que sa résidence. En plus de l'abonnement, qui lui coûte
281,30 euros par an, elle doit donc acheter des tickets de métro et de
RER pour se rendre à son travail. Du coup, elle envisage de quitter son
emploi. "Je rêverais d'un travail dans l'université même pour
réduire les coûts liés aux trajets et avoir davantage de temps pour
réviser mes cours", dit-elle. Une bourse mensuelle de 200 euros lui
permet de compléter son budget et de verser une rétribution à sa mère,
fonctionnaire, chez laquelle elle vit.
RÊVE D'INDÉPENDANCE
La
région parisienne est l'une des régions où le coût de la vie est le
plus élevé, notamment en raison du prix des loyers. Il est plus facile
dans d'autres villes de quitter le domicile familial. Cependant, peu
d'étudiants réussissent à prendre tout de suite un logement seuls. Pour
beaucoup d'entre eux, la colocation est la meilleure solution.
C'est, par exemple, le cas d'Eva Gomez, 24 ans. Cette étudiante andorrane vit à Toulouse avec une de ses amies : "La colocation me permet de réduire le loyer presque de moitié. Je n'aurais pas pu me loger autrement", explique-t-elle.
Selon l'enquête triennale Conditions de vie de
l'OVE, le logement reste avec l'alimentation l'une des dépenses les
plus importantes des étudiants qui ne vivent plus chez leurs parents.
Claudie, étudiante à Lyon en master 1 de psychologie clinique, habite
avec sa soeur. Leurs parents, père chef d'entreprise et mère
puéricultrice, leur donnent 1 000 euros par mois qu'elles se partagent.
Mais Claudie ne se contente pas de ce revenu. Aspirant à une plus
grande autonomie, elle travaille dans un restaurant d'entreprise, où
elle gagne 270 euros par mois.
Si les jeunes rêvent
d'indépendance, rares sont ceux qui peuvent y prétendre réellement.
Pour les y aider, l'UNEF revendique une "allocation d'autonomie".
Celle-ci serait versée à tout le monde, mais le montant varierait en
fonction des revenus de chaque étudiant. Durant la campagne
présidentielle, Nicolas Sarkozy avait évoqué la création d'une
"allocation formation" subordonnée notamment à la réussite aux examens,
la suppression des impôts sur le travail étudiant et la refonte du
système de bourses. Des mesures qui interviendront peut-être à la
rentrée.
Aurore Monard Le Monde Article paru dans l'édition du 31.05.07. |